Introduction
Les défis de croissance ou de développement auxquels l’Etat doit faire face justifient la recherche de voies susceptibles d’atteindre les résultats escomptés. Les Partenariats Public-Privé (PPP) peuvent être vues comme une de ces voies. Toutefois, afin qu’une telle opération ait des chances d’être “gagnant-gagnant”, cela implique un encadrement règlementé, une bonne gestion des risques, une négociation sur tous les aspects fondamentaux. C’est dans cet esprit que la Guinée s’est dotée d’une loi relative aux PPP[1] adressant les spécificités du PPP.
Définition et domaine d’intervention
Un PPP constitue un engagement contractuel entre l’Etat ou une collectivité publique et des entreprises privées, en vue de la construction, la gestion ou la préservation d’un projet d’intérêt public[2]. Il en résulte donc un partage de responsabilité, de droits et de risques, pour une durée déterminée.
Les activités de services publics susceptibles de faire l’objet d’un PPP sont multiples et peuvent se classer en trois (3) catégories :
- Services relatifs aux fonctions régaliennes : portent sur la justice, la défense nationale, les finances publiques, etc. Elles sont difficiles à déléguer ou à sous-traiter.
- Services publics non marchands : concernent la santé, l’éducation nationale, la sécurité sociale, etc. Elles peuvent être déléguées à des organismes privées.
- Services publics marchands : sont généralement financées par une activité commerciale et portent sur les services publics en réseau, à savoir, les transports, l’énergie, les télécommunications, l’eau potable, l’électricité, le gaz, etc.
Cette dernière catégorie de services publics en réseau représente les PPP les plus courants en Afrique subsaharienne.
Spécificités Guinéennes
Dans le cadre des marchés publics, l’objet (fourniture de travaux, de biens ou de services) est financé directement par le budget de l’Etat et ses démembrements.
Pour sa part, le domaine d’application de la loi sur les PPP en Guinée exclut expressément le recours aux marchés publics dans son champ d’application contractuel.
Ainsi, les contrats de PPP sont qualifiés de contrats administratifs et doivent correspondre aux programmes de développement et aux orientations du gouvernement.
Typologie de contrats de PPP
Le contrat de PPP est écrit et conclu entre l’autorité contractante (l’Etat) et le titulaire [4]. Il peut revêtir les formes suivantes :
- le contrat de partenariat
- la délégation de service public
- tout autre accord contractuel (BOT [5] et ses formes dérivés).
Contrat de partenariat
C’est un contrat dans lequel l’autorité contractante confie à un titulaire pour une période déterminée, une mission globale ayant pour objet la conception, la construction ou la transformation, l’entretien, la maintenance, l’exploitation ou la gestion des infrastructures nécessaires au service public ou d’intérêt général, ainsi que tout ou une partie de son financement.
Délégation de service public
Trois (3) sortes de délégation sont expressément consacrées.
Concession
Contrat de PPP par lequel l’autorité contractante confie à une personne privée[6] l’exploitation d’une infrastructure ou l’exécution d’un service public tout en lui conférant le droit de se rémunérer par la perception des redevances sur les usagers de l’infrastructure ou ceux bénéficiant du service public. Ce type de contrat peut inclure ou non l’exécution de l’ouvrage.
Affermage
Contrat de PPP par lequel une autorité contractante confie l’exploitation d’un service public à un titulaire (fermier) après remise des infrastructures nécessaires à cette exploitation. Le fermier verse des redevances à l’autorité contractante suivant des modalités définies dans le contrat de PPP.
Régie intéressée
Contrat de PPP par lequel l’autorité contractante finance l’établissement d’un service public mais en confie la gestion à une personne privée rémunérée par une partie fixe et principalement par un intéressement aux résultats de l’exploitation (gain de productivité, économies réalisées, amélioration de la qualité de service).
Durée du contrat PPP
La durée du contrat dépend de la période nécessaire pour assurer l’amortissement de l’investissement du titulaire, sans pouvoir excéder trente (30) ans, sauf autorisation donnée par le Ministre en charge des Finances, aux termes de l’article 19 de ladite Loi.
Avantages[7]
Les PPP comportent certains avantages, notamment :
Réalisation d’économies
Le montage des projets peut permettre la réalisation d’économies et des améliorations qualitatives (conception, constructions, gestion de nouvelles installations). Il en résulte que la réduction des coûts induit une économie budgétaire voire une garantie contre les dépassements.
Rigueur dans la planification
Dans le mécanisme des PPP, les autorités gouvernementales sont censées mettre en place un processus rigoureux basé sur la détermination des résultats attendus et sur une évaluation des coûts totaux de la prestation des services.
Cadre favorable à l’innovation
L’entente contractuelle des PPP laisse généralement le choix des moyens au partenaire privé. Cette option peut potentiellement permettre le développement de procédés et de technologies innovants.
Source de revenus additionnels
Les projets offrent parfois un potentiel de commercialisation supplémentaire. Le partenaire privé peut réaliser des revenus additionnels (eg publicité sur des ponts ou des autoroutes) permettant de diminuer les coûts d’exploitation par rapport à ce qu’ils auraient été dans une exploitation directe par le secteur public.
Risques [3]
Les PPP comportent beaucoup de risques de diverses natures, notamment :
Risques liés au contrat
- complexité du contrat : un contrat PPP peut se révéler vite extrêmement complexe, chaque partenaire essayant de se prémunir de nombreuses situations défavorables pour lui, pouvant mener à des clauses contradictoires, rendant la gestion des litiges difficiles.
- durée du contrat : l’engagement pouvant s’étendre sur une trentaine d’année, les erreurs devront s’assumer sur cette même durée, sauf dénonciation du contrat ou renégociations des modalités de collaboration (pas toujours aisées et possibles sources de perturbations dans l’exécution du service).
- incertitude des prévisions : les clauses contractuelles liées à la répartition des recettes se fondent sur des prévisions de coûts et d’utilisation. Or il est souvent tentant d’embellir les choses et de faire des prévisions de recettes et de coûts de fonctionnement particulièrement optimistes (Grosses recettes, faible coûts de fonctionnement …)
Risques liés au projet
Les grands travaux sont des domaines où les erreurs d’appréciation et les aléas multiples sont monnaie courantes entrainant :
- Dépassement des coûts
- Dépassement des délais
- Malfaçons ou qualité insuffisante
Risques liés aux opérations (exploitation du service)
- Risques de marché : les incertitudes de la demande du marché, par exemple, les risques de volume et de prix.
- rendements difficiles à mesurer : en phase d’opération, les infrastructures doivent faire l’objet d’un contrôle de gestion précis afin d’être capable contrôler la réalité des recettes et dépenses liées à leur exploitation, ces indicateurs étant le plus souvent spécifiés dans les contrats et utilisés pour le partage des recettes ou des déficits …
- coûts additionnels de fonctionnement : typiquement, les coûts d’entretien peuvent s’avérer bien plus élevés que prévus, notamment en cas de réalisation de médiocre qualité, diminuant d’autant la rentabilité de l’exploitation.
Risques politiques et financiers
- guerres, troubles civils, terrorisme, expropriation, …
- variations du taux de change, la dépréciation de la monnaie, …
CONCLUSION
Les PPP peuvent impacter les finances publiques des générations futures, les enjeux sont donc considérables.
Parallèlement, ils présentent de très nombreux risques plus ou moins maitrisables.
Ils semblent donc être une belle rose mais avec de nombreuses épines.
Selon Richard Florizone[8], les facteurs de réussite des PPP sont :
- un engagement politique vigoureux
- un projet économiquement viable
- une approche rigoureuse dans l’exécution
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Bibliographie
– Financement d’un projet de partenariats public-privé (PPP), Constantin KUBETERZIE DABIRE, éditions L’Harmattan 2014
– Loi N°0032/2017/AN du 04 Juillet 2017 portant partenariats public-privé en Guinée
[1] Loi N°0032/2017/AN du 04 Juillet 2017.
[2] Constantin KUBETERZIE DABIRE.
[3] PPP & infrastructures de développement : expérience Malaisienne.
[4] Personne morale privée ou la société de projet ayant conclu le contrat de PPP avec l’autorité contractante.
[5] Construction-Exploitation-Transfert.
[6] Désigne une personne morale de droit guinéen, de droit étranger ou un groupement de personnes dont la majorité du capital ou des droits de vote ne sont pas détenus directement ou indirectement par des personnes publiques.
[7] Constantin KUBETERZIE DABIRE.
[8] Cours Coursera MOOC PPP.
Je veux apprendre
Article intéressant, bien que très synthétique. Je souhaite l’explorer plus en détails.