OHADA : Constitution de la SA 8


Introduction

gratte-ciel-2La constitution de la société anonyme (SA) est souvent considérée comme l’apogée de l’entrepreneur ; car la mise en place de cette entreprise implique de nombreuses ressources d’où une certaine capacité financière. La SA est une société dans laquelle les actionnaires ne sont responsables des dettes sociales qu’à concurrence de leurs apports, et dont les droits sont représentés par des actions ; et ceci en vertu de l’article 385 de l’Acte uniforme sur les sociétés commerciales et le GIE. Toutefois, la concrétisation de ce projet suscite diverses interrogations. En effet, le désir d’adoption de cette forme sociale induit un choix entre les différentes SA, dans l’espace OHADA.

Conditions de fond

Elles sont relatives aux actionnaires et au capital social.

Actionnaires

La SA peut être constituée par une seule personne physique ou morale appelée « actionnaire » par le biais d’un acte unilatéral.

En sus, elle peut également être formée par deux (2) ou plusieurs personnes. Dans l’espace OHADA, les actionnaires d’une SA peuvent également être des époux, des interdits (mineurs) voire des personnes frappées d’incompatibilité (avocat, fonctionnaire…).

Capital social

Actions-SALe capital social d’une SA est au minimum de dix millions (10.000.000) F.CFA, et est divisé en actions dont la valeur nominale est librement déterminée dans les statuts par les actionnaires, conformément à l’article 387 de l’Acte uniforme précité. Ainsi, contrairement à la SARL, la valeur nominale minimale des actions n’est plus déterminée par les dispositions de l’OHADA.

Cependant, le capital social des SA faisant appel public à l’épargne [1] est d’au moins cent millions (100.000.000) F.CFA [2].

Dans cette société, les actionnaires peuvent effectuer des :

  • apports en numéraire : ils ont la possibilité de libérer le quart (1/4) du montant du capital social lors de la constitution de la société, sous réserve de libérer le surplus au plus tard trois (3) ans à compter de l’immatriculation de la société au registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM) [3].
  • apports en nature : ces apports doivent être obligatoirement évalués. En effet, le commissaire aux apports est requis d’office pour tout apport en nature[4].

Toutefois, les apports en industrie sont interdits dans les sociétés anonymes, selon l’article 50-1 alinéa 1 dudit Acte Uniforme.

Conditions de forme

La procédure de constitution de SA, peut varier en fonction de la nature des apports des actionnaires.

Règles générales de constitution

Elle comporte plusieurs phases, notamment :

  • l’établissement des bulletins de souscription ;
  • le dépôt des fonds et de la déclaration notariée de souscription et de versement (DNSV) : c’est un acte notarié certifiant que le montant des souscriptions déclarées est conforme au montant figurant sur les bulletins de souscription et que celui de versement est conforme au montant porté sur l’attestation bancaire délivrée.
  • la signature des statuts[5],
  • la tenue du 1er conseil d’administration : en cas de constitution de la SA avec Conseil d’Administration ;
  • la publicité : l’immatriculation au RCCM, et l’insertion d’un avis dans un journal d’annonces légales.
  • Règles spécifiques de constitution

La constitution d’une SA par des apports en nature exige obligatoirement la tenue d’une assemblée générale constitutive, permettant d’évaluer lesdits apports.

Cette assemblée permettra de constater la libération du capital social, d’adopter les statuts, de nommer les premiers administrateurs, les commissaires aux comptes…

Typologie de SA

La société anonyme (SA) est caractérisée par un dualisme dans son mode d’administration. Les actionnaires qui veulent constituer une SA ont l’option entre :

  • la SA avec Conseil d’Administration
  • la SA avec Administrateur Général.

Néanmoins, les actionnaires peuvent en cours de vie sociale, modifier leur mode d’administration et de direction.

 

SA avec Conseil d’Administration [6]

La composition du conseil d’administration

Il est composé de trois (3) membres minimums et de douze (12) membres maximaux. Toutefois, si la SA fait appel public à l’épargne, le maximum de ses membres est de quinze (15). Conseil-administration-SA

Les statuts peuvent imposer que chaque administrateur soit propriétaire d’un nombre d’actions ; cette disposition ne s’applique pas aux salariés nommés administrateurs, conformément à l’article 417 dudit Acte uniforme.

Ce faisant, les Administrateurs peuvent être révoqués « ad nutum » c’est-à-dire à tout moment par l’assemblée générale ordinaire [7].

Les pouvoirs du conseil d’administration

Il est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances au nom de la société, en vertu de l’article 435 de l’Acte uniforme précité. Il les exerce néanmoins dans le respect de l’objet social et sous réserve des pouvoirs reconnus aux assemblées d’actionnaires.

Ainsi, le conseil d’Administration a compétence notamment pour :

  • préciser les objectifs de la société et son orientation,
  • exercer un contrôle permanent de la gestion,
  • arrêter les comptes de chaque exercice,
  • nommer les dirigeants sociaux (Président du Conseil d’Administration et Directeur général, Président Directeur Général voire Directeur Général Adjoint),
  • créer des comités (composition et attributions)…

Mode de direction

La SA avec conseil d’administration a également un mode de direction dualiste. En effet, cette SA peut assurer sa direction :

  • soit par un Président Directeur Général (PDG) [8], assisté éventuellement d’un Directeur Général Adjoint (DGA) ; la durée de son mandat ne peut excéder celle de son mandat d’administrateur.
  • soit par un Président du Conseil d’Administration (PCA) et un Directeur Général (DG), en vertu de l’article 415 de l’Acte uniforme précité.

Ainsi, ces dirigeants sociaux doivent nécessairement être des personnes physiques. Ils sont également révocables « ad nutum » [9].

Ce faisant, les fonctions de PDG et PCA sont assumées obligatoirement par des Administrateurs ; tandis que les fonctions de DG et DGA peuvent être effectuées par des personnes qui ne sont pas Administrateurs, ni Actionnaires.

SA avec Administrateur Général

Les Actionnaires ont la possibilité d’opter pour la SA avec Administrateur Général si leur nombre d’Actionnaires est égal ou inférieur à trois (3), en vertu de l’article 494 de l’Acte uniforme précité.

Ainsi, ils désigneront un Administrateur Général qui cumulera les fonctions d’administration et de direction de la société. Toutefois, il peut être assisté par un Administrateur Général Adjoint. Ils sont également révocables « ad nutum », et les règles de désignation sont identiques aux Administrateurs.

Avantages

La société anonyme est une société à risque limité, dont les actionnaires ne supportent les pertes sociales qu’à concurrence de leurs apports. Par conséquent, il n’y a pas de confusion entre le patrimoine de l’actionnaire et celui de la société. Les créanciers de la société ne peuvent pas donc poursuivre les associés dans leurs patrimoines propres : elle est une structure idéale pour la protection du patrimoine de l’actionnaire.

Cette entreprise, comporte aussi une possibilité de libération progressive des actions souscrites en numéraire par les actionnaires.

En outre, les actionnaires de la SA n’ont aussi pas obligatoirement la qualité de commerçants ; par conséquent, les mineurs et interdits peuvent notamment être des actionnaires.

En sus, la SA peut émettre des valeurs mobilières [10] (actions, obligations), susceptibles d’être cotées à la bourse.

Inconvénients

La SA est une société hiérarchisée où chaque organe dispose de pouvoirs propres et dont le caractère institutionnel est très marqué [11]. En effet, au sein de cette société, coexistent parfois les actionnaires (assemblée générale), les administrateurs [12] (conseil d’administration) et le commissaire aux comptes (organe de contrôle). La multiplicité de ces organes peut entraîner une confusion des attributions respectives, car les intervenants n’ont pas d’office une certaine culture juridique. Généralement, en Afrique [13], la plupart des entrepreneurs ont la notion du juriste « sapeurs pompiers » (on ne consulte que lorsqu’on a un différend), en occultant l’aspect préventif, à moindre coût : le conseil !

Par ailleurs, le montant de son capital social est très élevé bien qu’il soit possible de le libérer en plusieurs tranches ; et cette libération est limitée dans le temps.

En outre, la tenue de sa comptabilité est régulière, rigoureuse et annuelle, car étant assimilée aux grandes ou moyennes entreprises ; elle est souvent soumise au système normal ou au système allégé de présentation des états financiers de synthèse, en fonction du montant de son chiffre d’affaires.

Enfin, Les SA ont l’obligation de désigner un commissaire aux comptes, qui effectue une prestation de service, dont les honoraires constituent des charges régulières et constantes pour la société.

Conclusion

La constitution d’une SA induit que cette entreprise soit « grande » voire crédible. Il n’en demeure pas moins que la grandeur d’une société dépend plus de ses qualités de services ou son degré de professionnalisme. Il faudrait donc se méfier de « l’emballage » et s’attacher aux services proposés, au risque de désenchanter !

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Bibliographie


[1] Ce sont les sociétés dont les titres sont inscrits à la Bourse ou dont les valeurs mobilières sont gérées par les établissements financiers, aux termes de l’article 81 et 83 de l’Acte uniforme précité.

[2] Aux termes de l’article 824 dudit acte uniforme.

[3] En vertu de l’article 389 dudit Acte uniforme. Le retrait des fonds n’est possible qu’après l’immatriculation de la société au RCCM.

[4] Selon l’article 400 de l’Acte uniforme précité.

[5] En sus, des mentions communes des statuts, ils doivent contenir : le mode d’administration et de direction de la société, la désignation des premiers responsables de la société savoir les membres du conseil d’administration ou l’administrateur général, les commissaires aux comptes titulaire et suppléant,…

[6] Le Conseil d’Administration détermine les orientations de l’activité de la société.

[7] Conformément à l’article 433 de l’Acte uniforme précité.

[8]Il peut éventuellement se faire assister par un Directeur Général Adjoint, selon l’article 470 de l’Acte uniforme précité.

[9] La révocation à tout moment.

[10] Titres émis par des personnes morales publiques ou privées, transmissibles par inscription en compte ou tradition (remise de la chose objet du contrat), qui confèrent des droits identiques par catégorie et donnent accès directement ou indirectement à une quotité du capital de la société émettrice, ou à un droit de créance général sur le patrimoine.

[11] Droit des sociétés, Maurice COZIAN, Alain VIANDIER, et Florence DEBOISSY.

[12] Les actionnaires peuvent aussi être administrateurs.

[13] A l’exception des grandes multinationales.


A propos de Thérèse Beticka

Co-créatrice du blog Business-en-Afrique.net, Fondatrice Gérante du Cabinet Daisy Conseils, Enseignante en Droit des Affaires, Consultante externe près la Commission Nationale OHADA Guinée, Arbitre CCJA (Cour Commune de Justice et d’Arbitrage à Abidjan)

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